Cas clinique : Persistance d’une communication interventriculaire chez un lapin nain
Persistance d’une communication interventriculaire chez un lapin nain
Cas clinique
- Un lapin nain mâle non castré de 5 ans et demi et pesant 1.3 kg nous est référé pour une échocardiographie suite à la découverte fortuite par le vétérinaire traitant d’un souffle droit et gauche de forte intensité (5/6) à l’occasion d’une consultation pour une rhinite bénigne.
Auteurs : Drs Sophie Romain, Lucas Flenghi et Celine Levrier 01-02-2017
Service NAC – Centre Hospitalier Vétérinaire des Cordeliers,
29 avenue du Maréchal Joffre, 77100 Meaux.
E-mail : nac@chvcordeliers.com
Persistance d’une communication interventriculaire chez un lapin nain
Le lapin est en bon état général et son appétit est conservé.
Il ne présente aucun symptôme classiquement associé aux maladies cardiaques chez le lapin tel que l’essoufflement.
Ses antécédents médicaux incluent : une rhinite modérée (en cours de traitement) ainsi qu’un épisode d’iléus traité médicalement et sans conséquences apparentes et une hospitalisation pour abattement et hypothermie, respectivement 6 mois et 1 an et demi auparavant.
Au cours de l’hospitalisation une biochimie rénale et hépatique avait été réalisée et était dans les normes.
L’environnement et l’alimentation du lapin sont corrects.
Il n’est pas à jour de vaccinations Myxomatose et VHD.
Au moment de l’échocardiographie le lapin est toujours sous antibiotiques (Trimethoprime-sulfamides) et AINS (Meloxicam) pour le traitement de sa rhinite.
L’examen clinique
L’auscultation cardiaque met en évidence un souffle systolique basal gauche et droit, irradiant également en région sternale de forte intensité (5/6). Le reste de l’examen clinique au moment de l’échographie révèle simplement la présence de la rhinite modérée associée à un jetage nasal muqueux modéré et en cours de traitement.
L’imagerie médicale
Une échocardiographie est réalisée suite à l’auscultation cardiaque. L’examen met en évidence une communication interventriculaire supracristale de petit diamètre (L=1,8 mm; CIV/Ao=0,3), avec un shunt gauche-droit de haute vélocité (> 5 m/s), respectant ainsi les gradients de pression ventricule gauche-ventricule droit. L’atrium gauche est néanmoins dilaté (AG/Ao=2), traduisant une élévation du volume atrial gauche, révélateur d’une élévation du volume pulmonaire secondaire au shunt gauche-droit à travers la communication. Enfin une insuffisance mitrale minime (Vmax=1.64 m/s ; SAG < 20%) est notée.
Traitement
Un traitement à base d’IECA (Enalapril, 0,25mg / kg une fois par jour) et de diurétique dose faible (Furosemide 0,5 mg/ kg une fois par jour) est entrepris. Une visite de contrôle et une nouvelle échocardiographie sont recommandées respectivement à 2 semaines et 6 mois.
Discussion
Les souffles cardiaques sont très rarement diagnostiqués chez le lapin, en partie en raison de leur fréquence cardiaque très élevée (180-300 bpm), rendant leur audition parfois difficile par le praticien.
Le diagnostic différentiel des souffles cardiaques inclut des maladies valvulaires et des malformations congénitales (persistance du canal artériel, communication inter-ventriculaire…).
Même si la médicalisation des lapins de compagnie est en constante augmentation, les maladies cardiaques du lapin restent probablement sous-diagnostiquées et la majorité des informations disponibles concernent les lapins de laboratoire.
Cependant deux cas de communication interventriculaire ont été décrits ces dernières années (Hildebrandt N et al., Restrictive ventricular septal defect in a dwarf rabbit, Tierarztl Prax Ausg K Kleintiere Heimtiere. 2016;44(1):59-64 et Vörös K et al., Ventricular septal defect with aortic valve insufficiency in a New Zealand White rabbit, J Am Anim Hosp Assoc. 2011 Jul-Aug;47(4):e42-9).
Soulignons qu’elles concernaient des lapins très jeunes (9 semaines et 10 mois d’âge) et étaient associées à des modifications cardiaques plus conséquentes (sténose pulmonaire, insuffisance de la valvule pulmonaire).
Un pronostic est difficile à déterminer car peu d’informations sont disponibles sur cette pathologie chez le lapin. Cependant elle a été régulièrement décrite chez le chien et le chat.
Ces derniers présentent un taux de survie élevé. Une grande proportion d’animaux sont asymptomatiques au moment du diagnostic, et peu de signes cliniques ont été décrits après le diagnostic (Bomassi et al., Signalment, clinical features, echocardiographic findings and outcome of dogs and cats with ventricular septal defects: 109 cases (1992-2013). J Am Vet Med Assoc. 2015 Jul 15;247(2):166-75).
Le cas clinique présent à pour intérêt de décrire un cas de communication interventriculaire chez un lapin adulte, de souligner l’importance du suivi médical chez les NAC au même titre que chez les autres espèces de compagnie ainsi l’utilité de l’échocardiographie chez le lapin ne présentant pas d’autre symptôme que le souffle cardiaque.
Les consultations de gériatrie sont recommandées tous les 6 mois à partir de l’âge de 5-6 ans.
Doppler 1
Coupe grand axe 5 cavités par accès parasternal droit : mode Doppler couleur de la région sous aortique et visualisation de la communication interventriculaire avec le shunt gauche-droit
Doppler 2
Coupe grand axe 5 cavités par accès parasternal droit : mode Doppler continu. Flux de shunt gauche-droit de vélocité élevée : Vmax=5,13 m/s